Université d'été de La Rochelle, fin août 2010. Arnaud Montebourg fait face à quelque 200 militants avides de connaître les détails de l'organisation des primaires qui désigneront le candidat PS pour 2012. Ils sont aussi un peu inquiets, ces militants... Le corps électoral de ce scrutin - qui se tiendra en octobre 2011 - sera pour la première fois élargi à toute personne qui s'acquittera d'un euro symbolique et signera une déclaration sur l'honneur stipulant qu'elle adhère aux valeurs de la gauche.
Certains imaginent donc déjà des cars pleins à craquer, déversant devant les bureaux de vote des centaines de milliers de militants UMP sans scrupules. Ils glisseraient dans l'urne le nom du plus mauvais candidat, celui qui s'inclinerait à coup sûr face à Nicolas Sarkozy... Du calme, ce scénario apocalyptique est en fait jugé totalement improbable, voir ridicule, par le PS. En cette fin d'été, Montebourg décide de rassurer la salle en faisant un test. L'artisan des primaires demande : "Parmi vous, qui serait prêt à payer et à signer sur l'honneur qu'il adhère aux valeurs de la droite pour aller perturber des primaires UMP ?" Moins de cinq mains se lèvent.
"C'est pas facile d'être un menteur"
La démonstration est irréfutable, selon Olivier Ferrand, coauteur avec Arnaud Montebourg de Primaire : comment sauver la gauche ? "Si un cadre de parti peut être assez pervers ou tordu pour s'amuser à aller perturber le jeu démocratique du camp d'en face, un citoyen n'est en revanche pas pervers", assure-t-il. Il se base sur une observation approfondie des primaires organisées en Italie et aux États-Unis, où "il n'y a pas eu d'infiltration du camp d'en face". Sans compter que "les primaires vont réunir des millions de votants. Pour que le parasitage ait un impact, il faudrait la mobilisation de beaucoup de militants de droite..."
Par ailleurs, il juge les obstacles à franchir assez rédhibitoires pour ceux qui seraient tout de même tentés par l'aventure. "Déjà, il faut mentir, c'est pas facile d'être un menteur", relève Olivier Ferrand en allusion à la déclaration d'adhésion aux valeurs de la gauche. "Et puis, il faut financer la gauche pour ce mensonge"... "Signer Je m'engage à soutenir les valeurs de la gauche, c'est proprement insupportable pour un militant de droite", renchérit François Lamy, le conseiller politique de Martine Aubry.
"Trop compliqué" pour Lancar
Ensuite, Olivier Ferrand fait valoir une organisation logistique compliquée à contourner : "Il faut s'inscrire dans le bureau de vote à côté de chez soi. Dans une zone rurale où tout le monde se connaît, un militant UMP qui voudra venir voter repartira avec du goudron et des plumes", dit-il en riant. Il concède toutefois "que l'idée passera sans doute par la tête de Benjamin Lancar", patron des jeunes UMP et auteur d'un lipdub qui l'a rendu célèbre, celui dans lequel certains ministres voulaient "changer le monde".
Pour écarter tout doute, nous avons demandé à Benjamin Lancar s'il comptait voter. "C'est vrai qu'entre militants, on en parle", nous répond-il avant de minimiser l'importance du débat : "Ça ne représente que 10 %, peut-être 5 % de nos conversations." "Dans le fond, on est très concentrés sur comment faire gagner Nicolas Sarkozy en 2012", insiste-t-il. "Et puis de toute façon, on n'y comprend pas grand-chose à leurs primaires, à la manière dont il faut s'inscrire, etc. Ça paraît trop compliqué et puis on n'a pas envie de participer à un concours d'ego." Ou quand le PS peut se satisfaire de la complexité de son organisation.
http://www.lepoint.fr/politique/presidentielle-2012-les-militants-ump-peuvent-ils-troubler-les-primaires-ps-01-02-2011-133993_20.php
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire