dimanche 27 mars 2011

François Hollande en orbite présidentielle

Il sort de sa poche droite un pompon rouge de marin offert peu avant et empoigne le fer à cheval que vient de lui donner un forgeron. "J’ai maintenant deux porte-bonheur, c’est pour les deux élections", s’amuse François Hollande. Le double destin de l’ancien patron du PS. La Corrèze d’abord. L’Élysée ensuite. Comme Jacques Chirac en son temps. Mais entre les deux, il y a la case primaire et, a priori, la bataille contre Dominique Strauss-Kahn, favori des sondages. Hollande a vu DSK, en novembre et en février: "Je vais à la primaire pour gagner, pas pour négocier, confie-t-il au JDD. Je suis ancien premier secrétaire du PS. Je ne suis pas là pour faire 20% et dire ensuite, comme dans un congrès du Parti : “Alors, maintenant, je veux 20% du gouvernement”."
Mais pour pouvoir se présenter, le député doit d’abord conserver la présidence du conseil général de Corrèze, ce qui se joue dimanche soir. "Si je perds ici, comment pourrais-je dire “je vais gagner la présidentielle”, ça n’aurait pas de sens!" Dimanche dernier, la gauche était majoritaire en voix dans son département (57% avec les écologistes), mais il n’est pas certain qu’elle soit, dimanche soir, majoritaire en sièges. La gauche a perdu Ussel dimanche dernier, elle doit gagner d’autres cantons pour garder le département. Samedi, à la Fête du cochon de Neuville, François Hollande serrait les mains, embrassait les joues, caressait les cheveux des enfants, demandait des nouvelles de la famille, bref se battait. Et il s’amuse. Face aux quatre cochons qui grillent sur leurs broches, il ironise: "C’est la droite qui rôtit." Devant deux coqs qui se battent, un vieil agriculteur lui lance: "Regardez: le petit hargneux, c’est Sarko." Le député se penche vers les animaux et suggère: "Et l’autre, c’est Marine Le Pen?"

"Sarkozy est défait dans le pays et dans son camp"

En Corrèze, Hollande joue son avenir. Sur ces anciennes terres résistantes, le FN n’a pas présenté de candidats. Mais en parcourant la France, le député a senti la montée de l’extrême droite. Et il entend s’adresser à ces électeurs que la gauche n’a pas su capter. "Notre choix stratégique doit être de leur parler de la France et pas seulement de la misère sociale dans laquelle ils sont, en leur promettant, par exemple, une allocation." Le score du FN au premier tour l’a profondément marqué, lui qui n’a jamais oublié le 21 avril 2002. Sa surprise vient plutôt de la baisse brutale de l’UMP. "Nous avons sous-estimé l’effondrement de Sarkozy. Il est défait dans le pays et dans son camp. Ça va tellement vite… Il y a besoin d’incarner une autre voie. Marine Le Pen est là, la force du mal est là, manque la force du bien." Cette force qu’il aimerait tant incarner…
Hollande croit à son destin. Il a changé, physiquement évidemment. Ses kilos perdus continuent à faire jaser, en Corrèze comme partout ailleurs. "On ne vous reconnaît plus, donnez-moi votre recette", lui lancent les fans de cochon. "Je mange du boudin, ce n’est pas gras", ose-t-il répondre à côté de Bébert le charcutier à l’origine de la fête de Neuville… "C’est l’eau de Treignac, je ne bois que ça", revendique-t-il devant le stand de cette eau corrézienne. Hollande veut croire que son régime n’est pas qu’anecdotique: "Il fallait un effort intellectuel, psychologique et physique pour être celui qui pourra incarner le pays. Pour passer de la sympathie à l’égard du premier secrétaire à la confiance envers un possible président, il fallait changer."
Et sortir du personnage de "M. Petites-Blagues". Hollande est un outsider, derrière DSK, talonnant Martine Aubry. Ses bons sondages le rassurent. "J’avais besoin d’être identifié à mes idées, à ma personnalité, à ma stratégie. J’ai créé une curiosité dans un moment où régnait le vide des idées." François Hollande n’a jamais été ministre, mais il a dirigé le PS pendant dix ans et a parcouru le pays dans tous les sens: "Connaître la France est une condition pour se lancer dans la présidentielle, ça ne suffit pas mais c’est une condition indispensable", dit-il. La mise en orbite présidentielle de François Hollande se jouera dans les prochains jours. Formellement, il attendra d’être réélu président de la Corrèze, ce qui devrait être fait jeudi. Sa déclaration de candidature se fera depuis son fief. Au moment où le PS discutera de son projet pour 2012.
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