On ne les entend plus, on ne les voit plus, sauf quand une crise les appelle en première ligne. Les ministres de François Hollande semblent perdus. "C'est une crise très grave. Depuis l'affaire Leonarda, c'est dur pour tout le monde. Il y a une unanimité, quels que soient les gens qu'on voit, ça ne va pas du tout." Ce ministre s'arrête, soupire et lâche : "Au fond, ça n'a jamais marché et là, ça se voit, donc il faut tout changer. Jusqu'ici, j'étais contre, mais il faut un remaniement et il faut que ça aille vite." Un ministre hollandais dramatise : "Le vrai risque, ce n'est pas d'être emporté, ce n'est pas une dissolution, c'est ridicule. Le vrai risque, c'est que les Français utilisent le premier rendez-vous électoral, celui des municipales, pour sanctionner lourdement le Président et le gouvernement. Le vrai danger, c'est celui de l'impuissance, si rien ne bouge, s'il ne change pas, lui."
"La panique saisit les gens pas rationnels, car le Président ne va rien faire du tout. Quand tu es dans les sables mouvants, si tu t'agites, tu t'enfonces. Donc on va patiemment attendre et faire notre boulot", confie un troisième. "Les ministres ont peur, ils sont tétanisés, ils se planquent", se désole un vieil ami de Hollande. "Les ministres se sentent comme les boxeurs qui prennent des coups, sonnés. Ils attendent. Le gouvernement est épuisé", décrypte un des membres influents de l'équipe Ayrault. Passage en revue non exhaustif.
Valls le sauveur suprême
Comme s'il n'appartenait pas vraiment à cette équipe, le ministre de l'Intérieur caracole en tête des sondages. Rien ne semble l'accrocher, même s'il divise la gauche sur certains sujets. Dans cette situation politique brouillée, sa parole porte encore. "Le déséquilibre entre sa popularité et celle du Président pose problème", déplore un de ses collègues.
Fabius le sage
Ses dossiers l'éloignent du marasme français. Mais il n'y a pas que ça. La solidité du ministre des Affaires étrangères frappe tous les interlocuteurs de Hollande. Premier ministre à 38 ans, Laurent Fabius a l'expérience de l'État. Avec lui, il n'y a pas de couac, et dans un moment où l'exécutif pêche par amateurisme, cela tranche.
Le Foll, Le Drian, Sapin, le pack hollandais
Hollande sait qu'il peut compter sur ses vieux amis. Le ministre de la Défense a su gérer la guerre au Mali. Jean-Yves Le Drian est, avec Fabius, en première ligne dans les affaires d'otages. Et le Breton a été mis à contribution pour régler la crise armoricaine. Michel Sapin, lui, a un rôle clé : il doit permettre au Président de tenir sa promesse d'inverser la courbe du chômage d'ici à la fin de l'année. Et faire en sorte qu'elle soit insoupçonnable. Stéphane Le Foll est le ministre qui monte, celui qui parle partout. Le ministre de l'Agriculture doit calmer la colère paysanne. Il a passé onze ans aux côtés de François Hollande rue de Solferino. Et même s'il n'en a pas envie et que le Président trouve que c'est un peu tôt, Stéphane Le Foll pourrait faire son retour à la direction du PS.
Bercy dans le viseur
Rivalités Moscovici-Cazeneuve, fuites incessantes, sentiment qu'il y a une nouvelle taxe par jour, colère des Français contre les impôts, il ne fait pas bon être à Bercy en ce moment. "Les cafouillages sur la fiscalité sont incroyables, on dirait qu'on annonce des mesures sans être prêts", peste un ministre. "Il y a un brouillage absolu de la politique économique. Admettre le "ras-le-bol" a détruit la politique fiscale du gouvernement, on paie tout ça. Le risque, c'est qu'on n'ait plus de levier économique", accuse un des poids lourds de l'équipe Ayrault.
Duflot la tortue
La ministre écologiste se replie sur son périmètre, se concentre sur son job de ministre du Logement. Duflot a fait voter sa loi au Sénat par toute la gauche, est allée sur Europe 1 cette semaine pour défendre le gouvernement sur la suspension de l'écotaxe. Au moment où certains conseillent à Hollande de se séparer des trublions Verts, Duflot choisit de ne pas faire de vague, d'être l'élève sage dans la tempête. Elle prépare le congrès d'EELV, qui s'annonce, dans un contexte de discrédit de l'exécutif, plus compliqué que prévu.
Le blues des "petits"
"Certains ministres sont tétanisés, les autres sont dépités, il y a les vedettes et ceux qu'on entend moins, qui travaillent beaucoup, qui sont désabusés", témoigne un ministre. Les couacs et les reculades ne viennent que rarement des "petits" ministres, mais ils savent bien qu'ils trinqueront, car l'équipe est pléthorique et les fuites sont trop nombreuses.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire