dimanche 13 juillet 2014

Hollande n'a pas peur de Montebourg

François Hollande aime par-­dessus tout être le maître de la synthèse, au centre de sa majorité. Il est donc officiellement content du show d'Arnaud Montebourg. "Sur la ligne tracée", commente en privé le Président, qui a envoyé dès le soir même un SMS plutôt sympathique à son ministre de l'Économie. ­Hollande aime les fortes têtes. Il reste nostalgique de la "dream team" de Lionel Jospin, de cet alliage de deux stars de l'époque, Dominique Strauss-Kahn et Martine Aubry, et tant pis si Manuel Valls et Arnaud Montebourg font un peu équipe de réserve de cette ancienne équipe de rêve.
"Arnaud s'est mis dans un cadre, celui du gouvernement, sur ses textes. Il a fait son discours à Bercy, dans le lieu de sa responsabilité, sur son secteur", raconte le Président à ses interlocuteurs. Montebourg veut s'attaquer aux professions réglementées? "Il a raison", confie en privé Hollande. Et sur l'Europe? "Il ne met pas en cause ce qu'on dit." Le chef de l'État dit souvent de l'ancien candidat à la primaire qu'il est "utile". Montebourg a annoncé 6 milliards pour le pouvoir d'achat des Français. Le prix à payer pour que le flamboyant ministre reste au gouvernement? "C'est à lui de les trouver, pas à nous de les donner", a confié Hollande.

Hollande : "Je lui ai laissé une large place pour valoriser les annonces sur Alstom, plus qu'il ne fallait"

Le Président connaît par cœur son ministre si sensible à ses marques d'attention, alors il le cajole. Parfois trop. "Je lui ai laissé une large place pour valoriser les annonces sur Alstom, plus qu'il ne fallait", a-t-il expliqué en privé. "Hollande est un peu comme un chat avec son petit jouet avec Arnaud, il s'amuse", décrypte un des rares qui connaît parfaitement les deux hommes. Et Montebourg prend soin de ne pas franchir la ligne rouge. "Doucement, Arnaud a rangé ses gaules, il s'est beaucoup assagi. Il a demandé Bercy, ce n'est pas pour partir. Arnaud cherche à consolider son équation : être si possible un homme d'État, sans perdre son côté rebelle", analyse un ami du ministre. "Arnaud développe des scénarios économiques, c'est son rôle. Son discours, c'était toutes les bonnes raisons de rester", glisse un proche de Montebourg.
Le chef de l'État ne croit pas à la démission de celui qui était finalement resté après le fiasco de Florange. "Il n'est pas dans l'état d'esprit de partir. Ni Manuel Valls ni moi n'avons eu le moindre signal d'un départ d'Arnaud Montebourg", a-t-il expliqué cette semaine. Ou encore, à un autre interlocuteur : "Il est dans le gouvernement, il applique la ligne du gouvernement. S'il en déviait, il en sortirait, mais il veille à ne pas en dévier." Et quand Hollande est encore plus cash, il dit en souriant : "Ceux qui sortent du gouvernement ne sont pas dangereux, c'est pour ça qu'il n'en sortira pas" ou "on a plus de visibilité à l'intérieur qu'à l'extérieur".

"Valls, il fait comme je voulais qu'il fasse"

Dans son interview du 14-Juillet, six mois jour pour jour après sa conférence de presse, Hollande reviendra sur les cent jours du nouveau gouvernement. Et sur sa relation avec Valls, qu'il est si content d'avoir nommé à Matignon. Parfois, le chef de l'État, un des meilleurs observateurs de la vie politique française, avoue : "La faute de Jacques Chirac est de ne pas avoir nommé Nicolas Sarkozy Premier ministre." Au moment où ce n'était plus vrai du tout, Chirac avait dit à propos de Sarkozy : "Je décide, il exécute." C'était déjà un 14 juillet. Cette semaine, Hollande a confié à des proches : "Valls, il fait comme je voulais qu'il fasse." Le Président est content de la fluidité de leurs relations et de l'omniprésence médiatique de Valls. Car pour lui, avoir un Premier ministre maîtrisant parfaitement la communication est un atout essentiel. En privé, François Hollande dit à propos de Jean-Marc Ayrault : "Il n'était pas assez présent médiatiquement et pas à son aise."
Demain, le chef de l'État ­parlera aux Français pendant trente ­minutes. "C'est le moment où on remet de l'ordre, où l'unité de parole se rétablit", affirme un hollandais. Le Président sait bien que les ­Français ne pourront retrouver confiance en lui que s'il réussit à faire baisser le ­chômage. Et s'il échoue, il sait aussi que ce sera l'échec de tous ceux qui ont gouverné avec lui. Un de ses proches s'agace : "Quand vous êtes dans le camp du Président, vous ne pouvez pas être candidat contre lui. Le faire croire, c'est juste faire du bruit avec la bouche." Et au gouvernement, les beaux parleurs sont légion.
 

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