Sa décision est prise : Manuel Valls va se lancer dans la course à l'investiture PS pour 2012. Le député-maire d'Évry avait fait le choix de soutenir Dominique Strauss-Kahn, voyant en lui un "mécanicien de la mondialisation, représentant les valeurs de la gauche" (voir notre dossier spécial : le PS en route vers 2012). C'était avant l'inculpation pour viol de DSK à New York. Lundi, huit jours après ce qu'il qualifie d'"onde de choc", Manuel Valls nous confie que "les cartes sont rebattues plus que ce que l'on croit".
Alors à la question "voulez-vous être candidat ?", il nous répond : "Bien sûr, j'ai envie d'être candidat." Et il développe : "Ce que j'incarne doit être représenté dans la primaire, et j'ai envie de le représenter." Pour sa déclaration de candidature officielle, il pense à sa ville d'Évry (Essonne). Et le fera sans doute avant le 28 juin, date d'ouverture du dépôt des candidatures.
Certes, il aurait aimé, nous dit-il, que le PS "fasse le choix de se poser un instant". Mais il constate que François Hollande multiplie les déplacements et les interventions médiatiques et que Martine Aubry a fait un pas vers sa candidature au 13 heures de France 2 dimanche... Puisque tout le monde accélère, la retenue qu'il prônait n'a plus lieu d'être. "Hollande partant, Aubry réfléchissant, on est dans l'emballement", constate-t-il. "Je refuse ce duel que l'on veut nous imposer."
Défi "exaltant"
Pas question pour autant de renverser la table et de passer en ces temps troubles pour un provocateur. Valls veut respecter "les initiatives de la première secrétaire", dit-il. Il sera présent au conseil politique convoqué par Martine Aubry mercredi. Samedi, il participera à la convention nationale de validation du projet pour 2012. Il compte également rencontrer ses "amis", cette "nouvelle génération qui doit prendre ses responsabilités", dit-il : Arnaud Montebourg, candidat déclaré depuis novembre, Pierre Moscovici et Vincent Peillon, qui soutenaient DSK. Lundi midi, il déjeunait à Lyon avec Gérard Collomb, également un fervent soutien de l'ex-patron du Fonds.
Valls juge le défi qui l'attend "très intéressant, très exaltant". Et puis il n'agit pas exactement sur un coup de tête. "Je m'étais décidé il y a deux ans", nous rappelle-t-il. C'était en juin 2009, il lâchait alors qu'"il serait logique que le maire d'Évry succède au maire de Neuilly".
"Une présidence retrouvée"
Depuis, il a eu le temps d'évaluer ses points faibles, dont le manque d'expérience : "Je n'ai pas été Premier ministre, ni premier secrétaire, ni même ministre..." Mais aussi ses points forts : "Je représente la jeunesse, la modernité, une gauche populaire. Je suis identifié sur les questions de sécurité, de banlieue, sur la République..." Et il est déjà en mesure de livrer quelques priorités : "Dire la vérité sur les comptes publics ou sur l'état de l'école, se pencher sur la question de l'échec scolaire."
Puisque la primaire est lancée, les premières piques volent. Face au "président normal" que se propose d'incarner François Hollande depuis plusieurs mois - une expression qu'il "n'aime pas, car la France n'est pas un pays normal" -, Valls propose "une présidence retrouvée, un président pédagogue, une présidence incarnée". Et un style : "Une présidence qui trace un cap, dirige toutes les forces vers un projet commun, avec une autorité apaisée, respectueuse des institutions et des Français." Bref, en opposition avec la "présidence brouillonne, qui crée des affrontements entre Français", de Nicolas Sarkozy. Pas anodin de la part de celui à qui ses camarades reprochent sans cesse des positions trop à droite.
Plus forte hausse du baromètre
Notre baromètre Ipsos-Le Point du mois de mai lui donne quelques raisons d'espérer. Chez les Français, Manuel Valls gagne six points par rapport à avril, à 29 % d'opinion favorable. Et chez les sympathisants PS, c'est encore plus impressionnant : il enregistre une hausse de 15 points, la plus importante du mois. 44 % des sympathisants PS ont une opinion favorable de son action.
"Je sens qu'il se passe quelque chose sur le plan politique", confie-t-il, pensant que son intervention sur le plateau de France 2 jeudi soir pour l'émission spéciale consacrée à DSK a été très bénéfique pour lui. "Six à sept millions de personnes ont vu...", lâche-t-il. Ce soir-là, il a piqué une grosse colère, dénonçant des "débats absurdes qui n'ont rien à voir avec la réalité" autour de l'affaire Strauss-Kahn. "Les gens que je croise me disent merci pour cela", dit Valls. "Et ils me demandent trois choses : "Du sang neuf, que l'on se rassemble, et ils me disent Allez-y !" Alors il y va.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire